Dans Amsterdam pluvieux où le jour est en berne
Quel est donc ce fumeur rêveur et nonchalant
Qui regarde par les vitraux d'une taverne
Le canal où se mirent les arbres tremblants ?
Rembrandt

Un obscur génie qui se nourrit de chimères
De visions, d'ombres, de songes hallucinants
Prométhée chu dans les marais de la misère
Pour avoir volé le ciel en peignant
Rembrandt

Pour le monde, il n'est plus qu'une épave, un paria
Un pauvre vieil idiot à l'âme inassouvie
Morte, et depuis longtemps, la femme de sa vie
Qu'aux jours de sa splendeur il tenait dans ses bras
Saskia

Où sont les visages rubiconds, les moustaches
Les mains crispées sur les épées
Les regards durs, les costumes brodés
Les velours, les panaches ?
Vanité des vanités, ombres sur le mur
Clair-obscur

C'est vrai que la gloire n'est pas pour les vivants
Un failli, un raté que l'opinion condamne
Un songe-creux, un sans-le-sou et cependant
Sans lui tu ne serais pas cette noble dame
Amsterdam

Rembrandt, des mains sur toi ont des teints des lumières
Tu meurs seul comme un pauvre mangeur de harengs
Mais aujourd'hui tu as surgi de ta poussière
Jusqu'à la fin des temps, toi, peintre le plus grand
Rembrandt
Rembrandt